Lìnkún : Lexique Philosophique Français – Fɔngbe

Lìnkún

Lexique Philosophique Français – Fɔngbe


I. Introduction

Avec Lìnkún — « graines de pensée » — s’ouvre une série consacrée à l’exploration philosophique de la langue fɔngbe. Pensée comme un lexique philosophique français–fɔngbe, cette publication, portée par le professeur Mahougnon Sinsin, se donne pour ambition de mettre en lumière la richesse conceptuelle de la langue, tout en offrant au lecteur des repères clairs pour en faciliter l’accès et la compréhension.

Les termes et analyses proposés dans cette série doivent être entendus comme des essais de conceptualisation. Ils n’ont pas vocation à clore le débat ni à fixer définitivement des équivalences, mais à ouvrir un champ de réflexion partagée sur l’étymologie, la formation des concepts et le lexique philosophique de nos langues nationales. Dans cet esprit, Lìnkún se veut un espace de recherche ouvert, appelant des lectures critiques, des prolongements et d’autres contributions susceptibles d’enrichir, de nuancer ou de parfaire le travail engagé.

Chaque livraison, publiée tous les quinze jours, présentera trois concepts, abordés selon une démarche à la fois rigoureuse et pédagogique : traduction, démembrement ou précision lexicale (vlɔ̌n / gbajɛ̌mɛ), explication, définition en fɔngbe (tínmɛ̀), ainsi que des citations en langue originale (nùbyɔ́xà). Ce dispositif vise à articuler clarté, profondeur et fidélité à la logique interne de la langue.

Lìnkún invite ainsi le lecteur à considérer la langue fɔngbe comme un véritable lieu de pensée, vivant et perfectible, où les concepts germent, se discutent et se transforment. Cette série s’inscrit dans une dynamique collective, où chaque « graine » proposée appelle dialogue, débat et fécondation intellectuelle.


II. Notices lexicales

Abaque, Abduction, Absolu

Abaque : Nǔlɛntavò

– Vlɔ̌n / gbajɛ̌mɛ :

1- Nǔlɛntavò : nǔ (chose), lɛ̀n (calcul), távò (table, planche).

2- Abàkù : è ɖè sín glɛku ἄβαξ mɛ̀ (tavò, àtɛ̀).

– Tínmɛ̀ :

Atɛ̀ e jí mɛxóxó lɛ nɔ̀ lɛ̀n nǔ ɖe é. 

– Ɖiɖe / Ɖèxlɛ́ :

Abduction: Vlέxόɖesínxό

– Tínmɛ̀:

Vlέxόɖesínxόmɛ ɔ́, xόɖesínxόmɛ ɖé wɛ̀ (syllogisme) bɔ xόgbetà tɔn (la majeure) ɖό xòkpɔ́n ǎ. Loɔ́, xόví tɔn (la mineure) kpodό ɖesínmɛ tɔn kpán (la conclusion) vlέ nùgbó.

– Bà nǔ yi nùkɔn:

Vlέxόɖesínxόmɛ nyí “απαγωγή” ɖò Alisitɔ́ti wěma lɛ́ mɛ (Aristote) ; Charles Pierce lílɛ́ ajà ná bó ylɔ́ è ɖɔ “abduction”.

Absolu : Nǔmaɖόjlέ, Nǔvɔ́ɖéwú

– Vlɔ̌n / gbajɛ̌mɛ :

Xóɖɔnǔ (substantif) : Nǔmaɖόjlέ, Nǔ-ayìmaxlá

Xóɖɔnǔwú (adjectif): Nǔvɔ́ɖéwú

Xótlɛ́dóxówú (adverbe) : Dàndàn, dódó, géé, sésé (absolument)

– Tínmɛ̀ :

Nǔmaɖόjlέ : Nǔ è hùgán nùbí é ; nǔ e ma jɔ̀ sín nǔɖíɖό ɖě wú à é.

– Nùbyɔ́xà :

Nà Sɛ́dámì yí xό bό ɖɔ̀ : Nǔ ɖé tíín bό nyí Nǔmaɖόjlέ zɛ Sɛ́ Gbɛnɔ wú à ?

A suivre

Prof. Mahougnon Sinsin

Chercheur en “Épistémo-logique”, Mahougnon Sinsin s’intéresse à l’étude des savoirs, des rationalités et des imaginaires épistémiques des anciennes sociétés africaines. Ses recherches visent en particulier à élaborer et à promouvoir une “Épistémologie de la Refondation”, dans la perspective diopienne de la “Philosophie du Retour”. Membre du Comité Scientifique du Laboratoire d’Études Africaines et de Recherches sur le Fá (LAREFA), il est auteur de divers ouvrages et articles.

2 commentaires

  1. Cher ami,

    Bravo pour cette première contribution à l’outillage conceptuel de notre langue, le fɔngbè. Elle ouvre un chantier important et nécessaire, et mérite d’être saluée à sa juste valeur.

    Permets-moi toutefois de formuler quelques observations à propos du terme « table ». Il me semble en effet que le mot « tavo » est directement issu du français table. Or, si l’on s’attarde sur l’étymologie du mot français, on constate qu’il provient du latin tabula, qui désignait à l’origine une tablette servant à écrire. Ce sens premier a progressivement évolué vers l’idée de liste, de classement ou de disposition ordonnée d’informations. C’est cette évolution sémantique qui explique l’usage contemporain du terme dans les domaines scientifique et mathématique : table de multiplication, table de valeurs, table périodique des éléments, etc., où il renvoie toujours à un ensemble de données présenté de manière structurée, lisible et systématique.

    Dans l’imaginaire linguistique et conceptuel fɔngbè, cependant, le terme équivalent de « table » — ou son emprunt direct — ne semble pas porter spontanément cette fonction de structure formelle ou de dispositif de représentation organisée des données. En revanche, le mot « àtɛ » véhicule l’idée d’étalement, d’exposition sur un plan, de mise à plat visible, ce qui correspond plus étroitement à la logique de présentation claire et ordonnée que requiert une table au sens mathématique.

    Il me semble donc que « àtɛ » serait un choix plus pertinent pour traduire le concept de table dans ce contexte précis. Ce terme exprime à la fois la notion de plan et celle de disposition exposée, rendant ainsi le sens plus immédiatement intelligible pour le locuteur fɔngbè, sans passer par le détour d’un emprunt ou d’une transposition conceptuelle étrangère.

    Je te soumets ces remarques dans un esprit de dialogue et de construction collective, fidèle à l’ambition même du projet.

    Bien cordialement,

  2. Une initiative salutaire qui doit interpeller toutes nos consciences distanciées de nous mêmes par les viols et violences de l’histoire … A suivre et partager …

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