
En France, le parti-pris de la manipulation domine parmi les grands personnages de l’espace politique, un espace sous influence qui rivalise de simulacre avec le théâtre.
Les dernières élections présidentielles ont porté cette logique de la réduction et du contrôle mental du citoyen à son comble le plus sinistre.
Les exemples sont légion et crèvent les yeux. Ainsi, considérons les trois premiers candidats arrivés en tête du premier tour des élections qui sont de véritables personnalités politiques – le quatrième, Eric Zemmour, n’étant qu’un avatar opportuniste de cette manipulation stigmatisée ici.
A tout seigneur tout honneur, Macron, le premier de ces trois gourous de la manipulation n’est pas seulement manipulateur mais un menteur invétéré, amoral et décomplexé ; ce qui constitue un vice aggravant. Ce travers est bien souligné par son postulat de l’ambivalence éthique, le sinistre « en même temps » qui, sous ses dehors faussement philosophique, n’est qu’une incantation sulfureuse.
Chez Macron, la manipulation est soutenue par l’armada des grands média qui, dans leur écrasante majorité, lui sont dévoués corps et âme. Ces médias à la solde exécutent à longueur de journée le concerto du donner à croire et de la pensée unique, ainsi que de l’exclusion/diabolisation des voix discordantes. De cela prennent le relai les gesticulations savamment organisées de la communication officielle du Président de la République, tout en séduction, en mensonge et en contradiction.
C’est ainsi que cinq années durant ces médias ont contribué à construire et imposer le schéma éculé du « Candidat républicain » versus le « fasciste Le Pen », un schéma hérité de l’œuvre au noir de François Mitterrand. Jusqu’au premier tour, l’irruption de Zemmour dans le paysage électoral français ne visait qu’un but : transférer provisoirement le rôle du diable sur sa personne, le temps de laisser Le Pen mariner dans l’éther d’une fausse normalité qui la propulsât au second rang devant un Mélenchon, autrement plus redoutable. Pendant ce temps, dans les sondages, le candidat de la France Insoumise était mis sous camisole de force et ce sur une durée suffisamment longue pour que ses alliés aillent en rang dispersés aux élections.
Marine Le Pen en matière de manipulation est loin d’être une novice. Elle joue sur la naïveté et la bêtise de ses électeurs en assenant la promesse de la préférence nationale fondée sur un malentendu qu’elle ne s’empresse pas de dissiper. Dans l’esprit de la grande majorité de ses électeurs, la préférence nationale, le fameux, « les Français d’abord » est synonyme d’expulser les étrangers, ( les Noirs et les Arabes plus exactement), les sacrifier sur l’autel ethnique de la supériorité blanche et chrétienne des Français. De ce point de vue, le fait que Marine Le Pen ait fait ses scores les plus élevés dans les DOM-TOM où les personnes non-blanches sont majoritaires en dit long sur ce malentendu, à moins que ce ne soit une manifestation pathétique du fameux syndrome « Peau Noire masque Blanc » de Frantz Fanon.
Marine Le Pen sait que dans le monde ouvert du 21ème siècle, la France ne peut pas s’en prendre inhumainement et illégalement à des ressortissants étrangers — fussent-ils Noirs ou Arabes — sans aussitôt susciter des représailles proportionnées qui pourraient nuire à ses intérêts. Si les excès fantasmés par ses électeurs devaient être mise à exécution par Marine Le Pen, du jour au lendemain dans une logique de la loi du talion, la France pourrait ne plus avoir accès à l’uranium du Niger si cher à ses centrales nucléaires, au pétrole du Congo ou du Gabon, aux métaux précieux du Sahel qu’elle pille jour et nuit. Tout cela, Le Pen le sait mais ne prend pas la peine de le dire à ses électeurs qu’elle laisse dans la nuit de cristal de leurs fantasmes bestiaux.
Enfin en ce qui concerne le dernier gourou, Mélenchon, quelle est cette histoire de troisième tour, l’appel lancé aux Français à l’élire Premier Ministre, sinon une opération douteuse, manière controuvée de leur demander de voter pour Macron?
Qu’un homme qui prétend lutter pour l’avènement de la Révolution, et stigmatise les travers du système, tienne des discours ambigus faits de revirements et de compromissions savamment élucubrés, voilà qui n’est pas moins manipulateur que ses rivaux ou opposants dont il se dit l’antithèse..
Au total, la manipulation, loin d’être une petite musique épisodique est l’hymne enchanteresse de la communication politique de l’élite au pouvoir en France ainsi que ceux qui aspirent à les remplacer.
Ahandeci Berlioz
