Ukraine : Pourquoi Poutine a Jugé le Moment Opportun pour Agir

Quand l’Armée russe est entrée en Ukraine au motif de venir au secours des autonomistes du Donbass et de Lougansk, le chœur occidental des donneurs de leçons a entamé  son hymne moralisateur traditionnel sur les libertés – celui qu’il a chanté en Irak, en Libye ou en Syrie avec les réalités ultimes et les conséquences que l’on sait. Les leaders du monde occidental, dominé par les USA ont chacun à son  tour et selon son style poussé le lamento de la liberté offensée. D’autres comme Macron en France y ont ajouté un semblant de rodomontade tragi-comique.

Avec le geste russe, tout à coup, en Occident on a eu comme l’impression que l’idée de liberté qui agonisait depuis deux ans sous les coups de boutoir de la politique sanitaire anticovid a fait un brusque sursaut du côté de la vie. La chose a été particulièrement remarquable en France où Macron usant de son promontoire européen et selon son éthique opportuniste, comme il le fait avec Covid, n’a de cesse de trouver le bon filon pour exploiter la crise ukrainienne à des fins électorales. Pour lors, le président français et candidat à sa propre succession se fait un inconditionnel avocat et héraut de la liberté du peuple ukrainien. Or, sans compter celle des peuples d’Afrique – Tchad, Mali, Sahel, etc – sur laquelle il chie et pisse sans état d’âme depuis cinq ans à l’instar de ses prédécesseurs,  au nom du Covid, il a fait peu de cas de la liberté des Français eux-mêmes. D’ailleurs dans le monde occidental, sa posture n’a rien d’original. Depuis deux ans, l’idée de liberté est tombée de son piédestal sacré  dans la plupart des pays occidentaux.

Calqué sur l’exemple chinois, le confinement imposé aux populations par mimétisme et sans aucune nécessité  ni preuve de son efficacité a ouvert le bal d’une dérive de mise sous séquestre des libertés. La dictature sanitaire qui mettait autoritairement hors jeu les soins et les médecins de ville, leur substituant les oukases d’un conseil sanitaire occulte ; l’érection des vaccins au rang d’unique recours thérapeutique contre la maladie ; l’obligation vaccinale déguisée qui allait jusqu’au licenciement sauvage  de certains soignants ; les divers pass – sanitaire et vaccinal – imposés en dépit du bon sens ont constitué une atteinte grave inédite aux libertés individuelles et collectives, en France et dans maints pays occidentaux. A cela, il faut ajouter diverses formes de censure médiatique, sociale et politique dont la  chasse aux sorcières complotistes et était l’argument magique.

Vu des pays traditionnellement qualifiés de dictature par les Occidentaux, cette dérive liberticide effrontée et sans précédent dans l’histoire était observée avec attention et intérêt. Les Chinois, qui étaient devenus le modèle des Occidentaux en matière de liberté, et surtout les Russes, leurs frères ostracisés, ont observé avec un intérêt amusé l’anesthésie furieuse des libertés en Occident. Et Poutine, en fin joueur d’échec, a déplacé le bon pion au bon moment ; pour lui comme pour maints observateurs non-occidentaux, la liberté en Occident était devenue le passé d’une illusion ; à défaut d’avoir vécu, elle était placée sous anesthésie. Ce constat ne semble pas étrangère à la tranquillité audacieuse avec laquelle, fort de sa puissance, Poutine a spéculé sur la mauvaise passe dans laquelle se trouve la liberté en Occident.

Dans un pays comme la France où sous-Macron se promeut officiellement l’idée que les devoirs devront passer avant les droits – y compris le droit aux libertés individuelles et publiques – on mesure bien les conséquences géopolitiques et internationales de ce délire autocratique apparemment idiosyncrasique. Car au-delà des erreurs diplomatiques évidentes et des injustices politiques accumulées qui expliquent en grande partie l’action des Russes, on ne peut sous-estimer la part dévastatrice de la mauvaise passe dans laquelle s’est retrouvée l’idée de liberté en Occident ces deux dernières  années. Nul doute que si Poutine n’avait pas compris que Covid a été une occasion pour l’Occident de démonétiser la valeur liberté, il n’aurait pas choisi ce moment précis, et  aurait réfléchi par deux fois avant de s’en prendre à celle des Ukrainiens, au nez et à la barbe de leurs faux amis Occidentaux.

Aminou Balogun

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