
Il va de soi qu’une menace extraterrestre d’envergure dissoudrait toutes les distinctions et oppositions éculées qui mènent le monde ; elle serait un facteur d’unité. Noirs et Blancs, musulmans et chrétiens, musulmans et juifs, Juifs et chrétiens, Russes et Américains, Américains et Chinois, etc.. se donneraient la main pour ne pas, divisés, tomber aux mains des envahisseurs extraterrestres. Tous prendraient conscience et s’agripperaient à leur identité humaine commune.
C’est une évidence éthologique, psychologique mais aussi politique qu’une menace extérieure radicale rapproche, réunit voire unit des êtres, entités ou groupes jusque-là figés dans le clivage et l’opposition. Une nation ne prend jamais conscience de son unité que lorsqu’elle est menacée de l’extérieur. Les oppositions passionnées ne sont bien souvent que l’expression de l’absence d’un ennemi commun.
Au Bénin, la seule menace que le Sud, démographiquement majoritaire, l’emporterait à des élections présidentielles obéissant loyalement au code régionaliste habituel unit d’instinct tout le Nord, malgré sa diversité. Mais paradoxalement, au Sud, cette loi ne semble pas fonctionner. En effet, on ne sait quelle sorte et quel niveau de menace extérieure ferait s’unir comme une seule entité fraternelle les peuples d’ancienne origine Aja, sans même compter leurs cousins Yoruba.
Au Bénin, en dépit de sa valorisation instinctive, le code de loyauté régionaliste ne fonctionne pas en faveur du Sud. Pour le peu de fois qu’un sudiste a été à la tête du pays, il n’a jamais été élu par une majorité de nordistes — que celle-ci soit relative ou absolue ! Or souventefois et de façon répétée, cela a été le cas dans la situation inverse. Car, le Sud n’a jamais été impressionné par la menace de la prise du pouvoir présidentiel par le Nord. Il s’en rit et s’en joue. Et, régulièrement, pour ne pas dire systématiquement, il y fait même recours pour trancher ses disputes intestines. Même s’il présente volontiers son forfait sous les dehors élégants du cosmopolitisme républicain. On préfère casser l’œuf disputé entre frères ou qu’il tombe dans la poêle à frire de l’autre, quitte a en garder la coquille, plutôt que de laisser son frère l’avoir.
Jadis, même la menace de la colonisation par le Blanc n’y a rien fait. Dans le feu de la passion fratricide, cette menace a été par le passé royalement ignorée, méprisée voire. C’est à force d’aveuglement dans la division et la défiance, à force de ne pas savoir jusqu’où il ne faut pas aller trop loin dans la passion fratricide que Gbɛhanziʼn et Tofà ont laissé la terre de leurs ancêtres communs tomber aux mains du colonisateur européen, venu de si loin, et qui ne nous ressemblait en rien. Tofà n’a pas hésité à pactiser avec les Français dans l’espoir de neutraliser Gbɛhanziʼn, son propre frère ; mais mal lui en a pris car, en matière de neutralisation du Noir, le Blanc ne fait pas de distinguo, et Tofà a fini par se neutraliser lui-même dans la foulée.
Aujourd’hui, l’histoire repasse les plats. On nous parle de djihadistes qui frapperaient dans le Nord du pays. Des actions terroristes d’un genre nouveau que le Bénin n’a jamais connu ont cours ; et, refusant d’en analyser la cause profonde, on préfère les étiqueter de dhihadistes. Or, bientôt, le moment venu, cette source d’instabilité inouïe révèlerait son vrai visage de chantage politique visant à rectifier une insoutenable anomalie : la détention hors norme historique du pouvoir présidentiel par un sudiste. Et tout ce petit jeu de dupe se met en place avec maints barons du Sud qui, comme toujours, aveuglés par leurs passions et leur frustrations du moment, estiment que tous les moyens sont bons pour en découdre avec leur propre frère sudiste. Et ce ne serait que justice éthique et historique, rien de nouveau sous le ciel du Sud qui prospère dans la haine de soi. Parce qu’au Bénin, si le Nord se comporte à bon droit comme un animal politique, le Sud en revanche, loin d’être une bête politique apparaît comme la plus bête des régions.
Bɛɖégla Alcibiade
