Les Européens, on le sait, ont une rage de dénier l’intelligence aux autres, notamment aux Noirs d’Afrique. C’est ainsi que pour eux pendant des siècles, surtout au moment où ils nous vendaient ou nous colonisaient, ils séparaient de l’Afrique noire tout ce qui avait trait de loin ou de près à l’Égypte. Comment une telle civilisation florissante en Afrique au moment où leurs ancêtres disputaient l’espace des grottes avec les bêtes sauvages pouvait être créée par des Africains ? Il a fallu la magistrale œuvre de Cheikh Anta Diop et de ses disciples pour donner du crédit à l’origine négro-africaine de la civilisation de l’Égypte antique.
La même obsession dénégatoire de l’intelligence nègre par le Blanc se retrouve aussi au Sud de l’Afrique. Que ce soit en ce qui concerne le Grand Zimbabwe, un ensemble de ruines d’une cité médiévale d’Afrique méridionale, située à une quinzaine de kilomètres au sud de la ville de Masvingo, dans le sud du Zimbabwe, ou les réalisations de l’art rupestre dans les grottes de l’Afrique australes. A chaque fois, surgit des théories farfelues pour attribuer à une présence blanche providentielle les œuvres de la création des Noirs Africains.
Si le cas du Grand Zimbabwe a été très vite élucidé sans grande résistance, celui de dessins rupestres de Brandberg prouve par ses rebondissements comment cette obsession dénégatoire du Blanc confine au ridicule.
De quoi s’agit-il ? Eh bien, d’une histoire à dormir debout, relayée par deux personnages clés. En 1917, un géologue allemand du nom de Reinhardt Maack explorait l’Omukuruvaro, massif d’Afrique australe que les Européens appellent le Brandberg. Dans un abri sous roche, il découvrit une représentation d’art rupestre ; clairement impressionné, il fait un croquis du panneau décoré.
Le personnage suivant de l’histoire est apparu en 1929. L’abbé Henri Breuil, le premier préhistorien français, s’est rendu en Afrique du Sud où il a pu examiner les collections ethnographiques du Département d’anthropologie de l’Université du Witwatersrand. Là, il a vu le croquis de Maack.
En 1947, l’abbé put enfin visiter le panneau décoré. Sur la base de ses observations et encouragé par son associée Mary Boyle, il déclara que la figure centrale était une représentation d’une jeune femme gracieuse d’origine minoenne ou crétoise, dont la présence fut expliquée par une ancienne visite méditerranéenne dans ce royaume du sud de l’Afrique.
Les universitaires et le public étaient d’accord : la légende de la «Dame Blanche du Brandberg» était née. Or, avec des recherches plus approfondies, les chercheurs découvrirent que la « dame blanche » avait un pénis. Les chercheurs ont également rejeté toute connexion européenne. L’archéologue sud-africain David Lewis-Williams déclare que la Dame Blanche du Brandberg «reste un symbole d’influence et de domination blanches» ; afin de comprendre pourquoi l’identification de l’abbé a été si vivement acceptée, l’archéologue sud-africain se concentre sur le rôle que les stéréotypes des San (Bushmen) ont joué dans la formation des conceptions coloniales du passé de l’Afrique australe. Lorsque les gens regardent des peintures rupestres, ils apportent avec eux une charge de bagages culturels et de préjugés ; presque inévitablement, ils trouvent dans l’art une confirmation de ces préjugés.
Depuis plusieurs décennies, cependant, des recherches très approfondies ont permis de mieux comprendre l’art rupestre d’Afrique australe et les personnes qui l’ont réalisé.
Ainsi, dans le Nord comme dans le Sud de l’Afrique, les Occidentaux on mené un combat acharné pour dénier l’intelligence aux Noirs d’Afrique. Si dans le Nord, ils ont été battus au point par les travaux de Cheikh Anta Diop, au Sud, ils ont perdu par K.-O.
Adenifuja Bolaji