Comme on peut le lire dans leur discours entièrement construit sur du sophisme, les gens qui soutiennent Zinsou ne sont capables de soutenir aucun raisonnement sérieux en défense de leur cause, en dehors de procédés rhétoriques, spéculant sur la naïveté de leurs vis-à-vis, amas de consensus frauduleux et de passages en contrebande d’une idée fixe et fausse.
Par exemple, inlassablement mais non moins malicieusement, ils font dire à leurs contradicteurs que ceux-ci ne doivent pas juger Zinsou sur la couleur de sa peau. Mais bon sang, soyons sérieux une seconde, quel Béninois a jamais jugé Zinsou sur la couleur de sa peau ? Voilà une subtilité mensongère à visée manipulatrice, mélange d’amalgame et de consensus frauduleux. Soyons sérieux : la peau de Zinsou est le dernier souci des Béninois. Les Béninois ne sont pas différents des Ghanéens sur ce point-là. Au Ghana, Jerry Rawling a été président, sans problème, tout simplement parce qu’il était un Ghanéen effectif ; et non pas quelqu’un venu du Royaume-Uni s’imposer de but en blanc président.
Tenez-le vous pour dit, zélateurs aveugles de l’obscène, contempteurs de la vérité claire, le choc de Zinsou est qu’il est un étranger politique. On ne peut pas venir soudainement, n’avoir jamais été un élu, ni militant d’aucun parti politique, n’avoir jamais participé à la vie politique d’un peuple, d’une nation, et prétendre vouloir conduire ce peuple, en être le leader ! Ce n’est pas possible ! Ko s̩es̩e !
Les soutiens de Zinsou se retranchent aussi volontiers derrière la constitution. Mais le seul respect de l’esprit d’une règle ne suffit pas pour en assurer une réalisation éthique. Si le seul fait d’être Béninois — à l’exclusion de toutes les autres conditions plausibles que la constitution ne dit pas — suffit pour que les Béninois acceptent quelqu’un comme leur président, je ne vois pas pourquoi nous ne prendrions pas le meilleur économiste du monde, prix Nobel, naturalisé Béninois pour la circonstance et désireux de jouer le jeu ? Or, tout le monde voit qu’en nous laissant dériver sur cette pente nous risquons de perdre notre âme, et ce de façon très constitutionnelle. De ce point de vue, on peut dire que constitution sans conscience n’est que ruine de notre constitution.
Si Zinsou le génial veut aider le Bénin, — lui qui, en dix ans de sa fonction farfelue de conseiller parisien de Yayi Boni ne l’a jamais fait — eh bien il y a de la place pour lui, mais pas au sommet de l’État ; pas en tant qu’architecte de notre maison commune, pas en tant que berger du troupeau national, pas en tant que pilote de notre vaisseau national : Non, non et non ! Migbi ! Ako ! Migbè ! Zélateurs de l’étranger politique, allez lui traduire ça !
Zinsou ou Sagbo, peu importe, personne ne peut comme un aigle d’un ciel hostile, fondre sur un pays et le saisir pour en être le président. Cette fantaisie qui a culminé avec Yayi est terminée ! Le président ne doit pas être étranger ni au peuple ni à la classe politique ; il doit être l’un des hommes les plus connus du pays et du peuple ; il doit émaner d’un terroir dont il connaît les valeurs, les symboles, les rythmes, les rites, la langue, la culture, les légendes, les saisons et les raisons. Zinsou joue sans vergogne sur le fait que son patronyme est connu et familier dans l’imaginaire collectif. Mais il ne suffit pas de s’appeler Martin ou Dupont pour être Président en France, même et surtout si on vient de l’étranger
Ce type de débarquement qui a été à la mode au Bénin et que Zinsou porte à son point culminant est maintenant impossible ! D’autant moins possible qu’il traine avec lui un relent scandaleux de colonialisme en une époque où l’Afrique aguerrie est jalouse de son indépendance. Le geste obscène de Zinsou est violent, injuste et paternaliste. C’est un forcing motivée par l’idée qu’on détiendrait la solution à nos problèmes. Mais le fait d’avoir la solution à nos problèmes n’est pas une raison suffisante pour être notre président.
Donc halte à cette obscénité que constitue l’irruption de Zinsou dans le débat présidentiel, à cause de la folie d’un homme aux abois qui, après avoir conduit le pays au bord du précipice se refuse à assumer ses responsabilités en se cachant derrière la figure rassurante du protectorat français. Le premier dégât de cette insanité est qu’elle a déjà privé les Béninois d’un débat sain sur les vrais enjeux de la présidentielle, les responsabilités des uns et des autres, et qui mérite vraiment d’être notre prochain président. Et rien que cette cynique usurpation est historiquement impardonnable.
Agada Balanpo