
On apprend que le 17 janvier 2024, Lionel Zinsou a été auditionné par l’Assemblée nationale française ; plus précisément la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale française sur la politique africaine de la France.
On se souvient — et l’article qui mentionne l’information use de ce titre– que Lionel Zinsou, sous la houlette néocolonisée de Yayi Boni, a été Premier ministre du Bénin. Dans cet élan et sous la même houlette sulfureuse façon « Je suis Charlie », Monsieur Lionel Zinsou a été propulsé candidat à l’élection présidentielle de 2016 face à Monsieur Patrice Talon. Cette élection était, sur le plan de la forme et des symboles, d’une absurdité pernicieuse et troublante à souhait : elle mettait aux prises un Français au patronyme bien béninois et un Béninois au patronyme bien français. Oui, s’il est Béninois par son père, Lionel Zinsou est bien Français et ne s’en cache pas. Il est français de par sa mère, de par sa naissance, sa par sa biographie, de par son parcours, de par ses engagements politiques, il ne connaît et ne parle aucune langue nationale du Bénin ; il n’est pas Français seulement sur le papier, mais il est aussi et surtout un patriote engagé et acteur du sérail néocolonial français.
Aujourd’hui donc, le voilà servant son pays dans son Assemblée en livrant à la France les conseils et informations nécessaires à la conduite de la politique africaine de la France. Un lion qui a fricoté avec les zèbres, et qui revient dire à la grande famille des Lions ce qu’il faut faire pour bien attraper les zèbres. Si nous ne marchons pas sur la tête, compte tenu du fait que la France n’a jamais voulu du bien aux Noirs et à l’Afrique, comment pouvons-nous comprendre et avoir contribué à l’érection de l’ambiguïté politique qui porte le nom de Lionel Zinsou ? Comment quelqu’un qui a été Premier ministre d’un État souverain d’Afrique, et qui en aurait pu être le président est maintenant à l’Assemblée nationale française en train de fournir des tuyaux et des informations à la France pour mieux coloniser et piller l’Afrique ? (la France n’a fait que ça depuis 500 ans, et n’est pas prête à changer son fusil d’épaule) Le fait d’avoir été Premier Ministre du Bénin n’implique-t-il pas de fait un devoir de réserve ? Cet exercice de l’audition est réservé aux acteurs politiques et sociaux français, pas à un homme béninois qui a rang de Premier ministre et qui aurait pu être président du Bénin. Toute la question qu’on se pose à propos de Lionel Zinsou est : est-il Béninois avant d’être Français ou Français avant d’être Béninois ? Cette question ne se pose pas à cause de sa binationalité qui est en soi une banalité, mais elle se pose parce que Lionel Zinsou est considéré comme un ancien Premier Ministre du Bénin.
Oui, en Afrique, par mimétisme, nous aimons à nous afficher ou à affirmer que nous sommes un État souverain. Le Bénin est l’égal de la Russie, de la Chine, des USA, etc.. Talon est le collègue de Poutine, de Macron de Xi Jin Pin, etc…Mais alors croyez-vous que Xi Jin Pin, Poutine ou Obama viendraient à l’Assemblée nationale française se faire auditionner sur la politique russe, sur la politique asiatique ou chinoise sur la politique américaine de la France ?
Ceux qui ont combattu la candidature de Lionel Zinsou à la présidentielle béninoise en son temps avaient été traités de racistes et de tous les noms. De nos jours, au vu des agissements paradoxaux ou décevants de celui qui avait alors servi de paravent national.– Patrice Talon– nombre de Béninois estiment qu’ils ne regrettent pas leur préférence pour Lionel Zinsou. Tandis que certains de ceux qui avaient voté et militaient pour Patrice Talon se mordent les doigts en raison de sa servilité sans nuance à l’égard de la France dont sa position dans la crise du Niger est une manifestation triste et cuisante. En effet, par rapport à l’allégeance et/ou la soumission au néocolonialisme français, Lionel Zinsou n’aurait certainement pas mieux fait que Talon. Au contraire, par rapport aux intérêts du Bénin, il aurait en homme rationnel qu’il est, une certaine retenue fort justifiée que Talon ne se soucie pas d’avoir ou n’a pas les moyens intellectuels ou politiques d’avoir. Mais sibè sibè, avant de regretter d’avoir combattu la candidature de Lionel Zinsou à la présidentielle béninoise de 2016, il faut prendre en compte les implications de sa nationalité française qui n’est pas la dernière de son identité biographique, et dont son audition à l’Assemblée nationale française n’est pas la moindre.
