Ruée vers la Bêtise : Déconstruction du Discours Pseudo-scientifique d’un Écrivain Raciste sur l’Afrique

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Après la démonstration, par F. Héran, de l’inconsistance scientifique des échafaudages de Stephen Smith autour des migrations africaines, J. Brachet met en évidence ce qui se joue réellement dans son livre partout célébré : l’appel ouvert à des politiques xénophobes et racistes.

À la sortie de chacun de ses livres, Stephen Smith reçoit les louanges de personnalités politiques et de la grande majorité de la profession journalistique française… avant de s’attirer les foudres du monde académique. Il y a quelques années, dans Négrologie, pourquoi l’Afrique meurt (Paris, Calmann-Lévy, 2002), il écrivait par exemple que l’Afrique est le « paradis de la cruauté » (p. 119) où les gens « se ‘bouffent’ entre eux » (p. 24) ; que les « Africains » refusent « d’entrer dans la modernité autrement qu’en passager[s] clandestin[s] ou en consommateur[s] vivant aux crochets du reste du monde » (p. 230) ; ou encore que « si six millions d’Israéliens pouvaient, par un échange standard démographique, prendre la place des Tchadiens, à peine plus nombreux, le Tibesti fleurirait » (p. 49). Des propos absurdes, violents et racistes qui furent néanmoins loués par la presse, et qui valurent à l’auteur le Prix France Télévision du meilleur essai en 2004. Tandis que, avec un écho moindre, de nombreux universitaires s’indignaient [1].

Le dernier ouvrage de Stephen Smith, La ruée vers l’Europe : La jeune Afrique en route pour le Vieux Continent (Grasset, 2018), ne déroge pas à la règle. Et c’est justement la répétition systématique de ce schéma qui interpelle. Comment l’auteur d’ouvrages dont la médiocrité scientifique et l’idéologie délétère ont été maintes fois démontrées peut-il être une fois de plus célébré ?

Présenté comme un « professeur » (Le Figaro 17/04/2018), « fin connaisseur de l’Afrique » (Le Monde 28/02/2018) dont il parlerait « en sage » (Le Monde08/02/2018) dans l’optique de « dépassionner le débat » (Ouest-France 12/03/2018) sur l’immigration africaine en Europe, Stephen Smith a fait le tour des rédactions, des studios de radio et des plateaux de télé. Invité partout pour assurer la promotion de son ouvrage, il n’a rencontré sur son chemin que de très rares contradicteurs et a pu présenter sa thèse comme allant de soi. Une thèse qu’il résumait ainsi sur France Culture : « l’Europe va s’africaniser. […] Chaque famille africaine aura d’ici une ou deux générations un neveu ou une nièce d’Europe. C’est inscrit dans les faits » (17/03/2018) ; et cela posera inévitablement de graves « problèmes », ne manque jamais de préciser Smith.

À défaut d’être tout simplement ignoré, un tel ouvrage mériterait pour le moins d’être débattu, d’autant que ce ne sont pas les contradicteurs qui manquent, ni les travaux rigoureux en manque de visibilité (cf. Aller plus loin). Sans entreprendre une critique exhaustive du livre, je souhaite ici mettre en lumière la faiblesse du raisonnement de Smith et la nature profondément idéologique de son propos.

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