Quand on dit que les Présidents africains  et notoirement les présidents françafricains sont des boys de la France, on croit souvent que c’est une vue injurieuse de l’esprit ou une métaphore satirique.

Mais la récente prestation du président béninois, Patrice Talon devant une télévision française propagandiste ultra ukrainiste  prouve si besoin en est la vérité de cette expression. Le format même de l’interview, son schéma et sa raison d’être sont proprement loufoques, tant on se perd en conjectures sur le bien fondé de leur inspiration et du pourquoi le président  d’un  petit pays africain sans histoire comme le Bénin serait amené à entretenir l’opinion française par le bais d’une télévision généraliste d’audience nationale alors que le paysage médiatique français dispose de chaînes plus spécialisées dans ce genre d’exercice.

Quoi qu’il en soit, c’était du pain béni pour le président nègre et boy. Talon s’est livré – et c’était le prix à payer pour l’honneur médiatique qui lui était fait— à  des déclarations honteuses qui feraient Béhanzin se retourner dans sa tombe. Ce qui n’est pas sans rappeler un certain Macron dans son éthique de « en même temps », car comment quelqu’un qui passe à ses heures pour adepte de Béhanzin, héros de la résistance à la domination française, peut-il se prêter à ce jeu de reptation qui ne correspond pas au sentiment profond de ses concitoyens ? 

Quel était le but de la manœuvre ? Envoyer des signaux d’isolement vers les pays africains comme la République centrafricaine, le Mali, la Guinée et autres Burkina Faso, amis déclarés de la Russie, et faire croire au monde entier, à commencer par les Africains eux-mêmes, que le point de vue du président béninois descendant de Béhanzin sur la guerre en Ukraine reflète celui de son peuple ainsi que de la majorité des Africains. Une initiative désespérée, consensus frauduleux qui prouve si besoin en est à quel point l’Occident est aux abois et fait flèche de tout bois…

Quel est l’intérêt de Talon dans cette manœuvre ? Eh bien, savourer l’honneur qui lui est fait de parler dans un média qui sort de l’ordinaire du ghetto médiatique françafricain réservé aux présidents boys de son acabit  — RFI, France 24, Jeune Afrique etc..—Ensuite obtenir le soutien de l’Occident grâce auquel on peut tout se permettre en tant que dirigeant africain, dans la mesure où on ne dirige pas pour son peuple – dont on se fout royalement de la sensibilité et des intérêts — mais pour l’Élysée, Paris, Londres, Washington, l’UE, etc. Dès que ces instances exogènes vous soutiennent et sont en accord avec vous, vous pouvez faire de votre peuple ce que vous voulez, vous avez carte blanche. En l’occurrence, fort de ce soutien,  Talon espère sanctuariser son régime et ses intérêts d’homme d’affaire, qui sont in fine la motivation ultime de son accession au pouvoir présidentiel.

Aminou Balogun