Pour Aller à Cotonou, il Faut Passer par Ouagadougou

imageL’exemplarité dynamique des histoires nationales fait réfléchir. En 1990, au plus fort des manifestations contre son régime, alors que la tension et l’incertitude de l’issue de la crise étaient à leur comble, Kérékou avait miraculeusement fait profil bas pour donner droit à la volonté du peuple béninois en lutte pour sa liberté. Le caractère spontané avec lequel l’ancien dictateur militaire s’est effacé a étonné plus d’un. Et, selon les intérêts ou les passions des uns et des autres, on a mis cette magnanimité miraculeuse du dictateur au compte de sa sagesse ou de l’héroïsme combattant des peuples béninois. Mais, outre sans doute que les deux motifs ne s’excluaient pas, une mise en perspective de l’événement montre que le geste de Kérékou, intervenant après le drame politique de Roumanie, au terme duquel le dictateur Ceausescu, à force de faire tête et front à la volonté du peuple roumain, se les est fait exploser à coups de balles après un jugement sommaire. Cette image du dictateur roumain jadis tout-puissant tiré comme un lapin, et dont le cadavre inerte baignait dans une mare de sang qui a été diffusée en boucle sur les télévisions du monde entier a fait réfléchir plus d’un dictateur notamment ceux qui, comme Mathieu Kérékou du Bénin, se réclamaient de la grande camaraderie internationale du communisme. Dans ces conditions, et sans préjuger de la sagesse supposée de Kérékou, ce ne serait pas une exagération de penser que les événements de Roumanie et la mort violente de son dictateur ont servi d’exemple au dénouement miraculeux de la situation politique au Bénin qui a conduit à ce qu’on a appelé le Renouveau démocratique.    

L’exemplarité dynamique de l’histoire des nations surtout à travers à des événements du temps présent ne manque pas d’imprégner d’autres nations auxquelles les circonstances présentent des situations analogues. De ce point de vue, ce qui se passe au Burkina Faso n’est pas sans conséquence sur ce qui se passe et se passera au Bénin dans les semaines et les mois à venir.
Dans les deux pays, nous avons deux dictateurs qui par des ruses politiques et une exaspération du formalisme constitutionnel essayent de s’accrocher au pouvoir, se considèrent comme un messie irremplaçable de leur vivant . Dans les deux pays, les peuples ne sont pas et ne restent pas inertes. Hier les Béninois ont marché par milliers à Cotonou pour signifier au pouvoir l’urgence de mettre fin à ses manœuvres dilatoires. Aujourd’hui au Burkina Faso, le peuple a pris d’assaut le Parlement qui a été incendié, histoire d’empêcher la comédie sinistre d’une modification de la constitution qui allait s’y dérouler en faveur du président Blaise Compaoré.
Si les Burkinabè réussissent à atteindre leur objectif, ce serait un exemple positif pour tous les autres peuples d’Afrique jusque-là impuissants, résignés face aux agissements scabreux de leurs dirigeants et dans l’expectative. L’exemple burkinabè sera comme un phare qui illuminera les autres peuples dans la nuit noire de la domination où les dictateurs imposent leur loi à coups de manipulation et de répression. Mais si d’aventure, Blaise Compaoré, le dictateur de Burkina Faso avait le dernier mot, alors ce serait un mauvais exemple pour les autres pays africains, notamment un pays frère voisin et francophone comme le Bénin dont l’espérance de sauver sa démocratie chèrement acquise sera sérieusement compromise.
Comme quoi, dans les semaines et les mois qui viennent, pour aller à Cotonou, il faut passer par Ouagadougou…

Adenifuja Bolaji

   

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