Ukraine-Taiwan: Stratégie américaine

Le raisonnement d’un expert français en géopolitique qui parlait de la crise en Ukraine a, par sa perfidie même, apporté une lumière crue sur la stratégie des Occidentaux  pour faire triompher leurs fantasmes d’une hégémonie pérenne sur le monde. Certes, il sautait aux yeux que l’expert, plus ou moins en manque  de reconnaissance institutionnelle,  apportait sa modeste contribution à l’effort de guerre que sa nation et sa race mènent contre les tenants d’un monde multipolaire.

A propos des tensions autour de la centrale de Zaporijia qui a subi des tirs d’origine controversée, mais qu’il serait absurde, comme s’est empressé de l’insinuer la propagande occidentale déchaînée, d’attribuer aux Russes qui l’occupent depuis mars 2022, l’expert après avoir ignoré proprement cette absurdité et même insinué la possibilité d’une action retorse de la part des Russes, n’hésite pas à leur attribuer la charge entière d’une potentielle explosion.

Et, dans le style pseudo-oecuménique hypocrite dont l’Occident est accoutumé, d’en appeler à une concertation internationale sur le sujet afin de faire entendre raison à la Russie. Pour cela, dans son délire ethnocentrique qui se pare des dehors d’une analyse rationnelle, l’expert exclut le soutien de la Chine à cette messe internationale, mais guigne sur les autres nations non encore totalement perdues selon lui à la cause du narratif hégémoniste occidental — notamment l’Inde, le Pakistan, le Brésil, etc.

En clair, la méthode occidentale pour neutraliser les tenants d’un monde multipolaire consiste à espérer diviser les membres du camp opposé. Si les Russes et les Chinois pour des raisons conjoncturelles évidentes ne sont pas prêtes à s’asseoir à la table de ce dîner de cons, l’expert français espère que l’Occident peut persuader les autres nations du bien fondé de ce marché de dupe ; comme si la guerre d’Ukraine était une fatalité, et que le parti-pris de la guerre, le mépris aveugle du dialogue et de la paix dont l’Occident a fait cyniquement l’option n’avait plus tout à coup aucune responsabilité dans cette crise et ses multiples potentielles conséquences.

Cette manière de penser de l’expert qu’il a en partage avec la tourbe infecte de ses congénères bourgeois, ethniques, nationaux, et ou occidentaux lève un coin du voile sur la méthode américaine et plus généralement occidentale pour mettre hors jeu l’épouvantail d’un monde multipolaire. Cette méthode est illustrée par l’apparente contradiction entre la grotesque provocation américaine sur Taïwan, au moment même où les mêmes Américains avaient au feu le fer de la guerre d’Ukraine.

Déstabiliser la Chine, créer une tension avec elle est conçu comme un moyen de la dévier de son élan économique et sa montée en puissance qui menace de détrôner définitivement les Etats-unis de leur première place dans le monde; c’est aussi un moyen d’occuper la Chine à faire autre chose que de se solidariser activement avec la Russie dans la crise ukrainienne. Au zénith de leurs fantasmes militaro-géopolitiques, les Etats-unis pensent qu’en guerroyant de front la Russie et la Chine, celles-ci se verraient imposer une urgence nationale prioritaire qui capterait toute leur énergie et attention, les affaiblirait et empêcherait de fait toute alliance active entre elles. Ce concept s’apparente à une semi-guerre mondiale où le seul camp concerté serait celui mené par l’Amérique, tandis que le camp adverse serait — non pas tant divisé, n’ayant jamais été vraiment uni mais — séparé, et empêché de se concerter activement.

Selon les fantasmes géopolitiques américain, on peut donc déclencher un conflit avec la Chine, pendant que se poursuit la guerre avec la Russie. Guerres, par proxi que les Etats-unis sont prêts à mener jusqu’au dernier Ukrainien et au dernier Taïwanais. Ce faisant, ils espèrent dans le même temps récupérer les compères géopolitiques de leurs deux ennemis mortels qui comme eux, piaffaient d’impatience d’en découdre avec l’ordre injuste du monde, mais qui, moyennant quelques avantages et concessions, pourront se laisser séduire par le chant de leur sirène

Adenifuja Bolaji

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