
« We can’t let Putin win » dit Biden de sa voix caverneuse d’agonisant.
Ce n’est pas « I can’t let Putin win », singulier contre singulier..
Ce n’est non plus « We can’t let Russia win » pluriel contre pluriel.
Dans la même veine, on entend le même Biden faire des affirmations saugrenues comme : « Putin will attack Nato« . Sans aller sur le fond du bien fondé de telles affirmations insensées et insidieuses, on est en droit de se demander comment un seul homme peut s’attaquer à un collectif militaire d’une trentaine d’États.
Ainsi, d’un côté, l’Occident mené par les États-Unis se considère comme une entité collective douée de moralité, de bon sens, située du bon côté de la raison. Et de l’autre côté, il a affaire à un homme seul, un fou mégalomane, dictateur, inhumain et barbare etc., qui s’attaque aujourd’hui à l’Ukraine et demain menacera la liberté du monde libre, à commencer par l’Europe.
Dire que les États-Unis sont en guerre contre la Russie, faire entendre qu’il s’agit au moins d’une guerre entre deux États, deux nations, donnerait du crédit à l’adversaire et questionnerait du même coup les États-Unis sur les raisons de cette guerre et ses origines obscures tenues sous le sceau du secret. Mais faire croire, comme ils l’ont toujours fait, à une guerre du bien contre le mal est convaincant et permet d’entourlouper l’opinion. Et si le bien est représenté par l’Occident collectif, le mal est représenté par un homme, un déviant, un fou, dont il faut tout faire pour neutraliser les lubies et les agissements avant qu’il ne soit trop tard.
Cette singularisation de l’ennemi, son individualisation forcenée, participe d’une rhétorique du manichéisme délirant qui est plausible dès lors que la bêtise ou le mal est vue non pas comme le fait de millions de gens mais d’un seul homme, en l’occurrence Poutine qui est fou, mégalomane, mal luné, etc.
Cette technique rhétorique cousue de fil blanc a déjà été utilisée moult fois par les États-Unis : Saddam Hussein, Kadhafi, Bachar el-Assad, etc. À chaque fois, ce n’était pas à un pays, une nation, un État que les États-Unis s’en prenaient ; ce n’était pas contre un pays, un État, un peuple qu’ils allaient en guerre, mais contre un individu.
Cette rhétorique découle des lois de l’appréciation du fait pathologique en psychiatrie. La folie collective n’existe pas ou n’est pas crédible. Si s’opposer au désir d’hégémonie des États-Unis est une folie ; si vouloir protéger les Arabes contre l’agression israélienne est une folie ; si chercher à doter l’Afrique d’une monnaie est une folie ; si demander à vendre son pétrole dans une autre monnaie que le dollar est une folie, eh bien, cette folie ne peut être le fait d’une entité collective ! Elle ne peut être le fait des trois quart de l’humanité, qui seraient alors atteints de la folie du désir de liberté et de souveraineté. Non, c’est le fait d’un homme, d’un seul : Khomeini, Saddam Hussein, Kadhafi, Bachar el-Assad, hier et aujourd’hui, Poutine.
C’est pour cela que vous comprenez, il va de soi que « We can’t let Putin win » ; une évidence frauduleuse joliment prononcée, et qui est censée faire sens dans l’esprit hyper-conditionné de l’Occidental moyen, à commencer par l’Américain ordinaire, qui la boit comme du petit lait….
Boris Azzedine
