Au-delà de la Démocratie : Pour une Afrique Noire Souveraine et Juste

Face à l’avalanche de coups d’État en Afrique, la communauté internationale et les biens pensants de la cédéao crient à l’offense faite à la Démocratie. Or ces irruptions de militaires dans l’arène politique n’ont rien à voir avec la Démocratie ou son contraire. En clair, du Mali au Niger, en passant par le Burkina Faso et la Guinée, ce qui a été à chaque fois renversé n’était pas la démocratie. Et il n’est pas sûr encore moins prioritaire que, malgré leur bonne volonté, ce qui sera bâti sur les ruines suite à l’action des officiers patriotes soit la démocratie.

Le seul fait que le phénomène ne touche que les pays francophones prouve bien qu’il y a des raisons spécifiques à ces pays qui vont au-delà de la démocratie ou même de son contraire. En effet, l’Afrique a plusieurs zones, culturelles et politiques : la lusophone, l’hispanophone, la francophone, l’anglophone, l’arabophone, etc… Pourquoi sont-ce seulement les pays francophones qui sont concernés par les coups d’État ?  Et pourquoi les médias et les politiques occidentaux font silence sur ce fait qui pourtant crève les yeux ? Non seulement en Afrique de l’Ouest où l’on peut supposer l’effet d’un tropisme sous-régional, mais comme on le voit avec le scénario loufoque du Gabon, l’Afrique centrale aussi entre malicieusement dans la danse.  Comme cela saute aux yeux, dans le cas du Gabon, la France, profitant de la cohue, fomente une révolution de Palais. Une parodie de coup d’État où elle exploite la joie des Gabonais de voir la mise à l’écart d’Ali  Bongo dont le nom hante la vie politique du pays depuis plus d’un demi-siècle, pour mieux leur imposer un homme à ses ordres. L’ingénierie néocoloniale de la France est à l’œuvre, parce que son rang  et ses intérêts vitaux en dépendent. Ses instituts de Recherches en stratégie de subornation des Noirs font du bon travail. Ils pondent des idées crapuleuses comme l’assassinat du Tchadien Déby pour le remplacer par son fils adoptif : l’art de cacher la consternation et le soupçon d’assassinat du père par l’intronisation du fils putatif… Un scénario qui a fait ses preuves au Congo avec Kabila, et que les services secrets français et les parrains de la Françafrique n’ont eu qu’à répliquer.

Tout cela montre que les coups d’État en Afrique ont moins partie liée à la démocratie qu’à l’insoutenable impénitence prédatrice et raciste de la France.

En effet, comme dans maints régimes en Afrique, mais poussé à un niveau caricatural dans les pays francophones, ce qu’on a coutume d’appeler démocratie n’est qu’une supercherie centrée autour d’élections savamment truquées : l’élection du président, homme fort, et l’élection du parlement, sa caisse de résonance. Après que le rideau est tombé sur ce théâtre, le peuple est mis hors jeu à 100%. La mission principale sinon exclusive du président homme fort est de servir les intérêts de la Grande France. Son salaire ? Le droit de persécuter ses opposants, de faire une gestion patrimoniale des biens publics, de s’entourer d’une caste de corrompus qui rivalisent d’ardeur dans le pillage des caisses de l’état,  le renflouement des banques occidentales, et l’acquisition de biens immobiliers de choix dans les pays occidentaux. Pendant que les peuples, abandonnés à leur sort, crèvent de faim.  Pendant que, jour et nuit la France pille les ressources et matières premières des pays. Pendant que la soi-disant communauté internationale qui a donné son onction au président homme fort chante ses bienfaits. Cette mission, le Président homme fort mis en lace et soutenu par la France l’accomplit avec à chaque instant une épée de Damoclès sur la tête : s’il venait à avoir des états d’âme, à trahir des réserves ou à manquer de zèle, il court le risque d’être déchu, comme Roch Kaboré, au Burkina Faso, récemment ou assassiné comme François Tombalbaye naguère au Tchad.

Voilà en gros ce qu’on appelle Démocratie en Afrique dont la zone francophone est l’épitomé et la caricature.

Quand on observe bien ce qui se passe depuis 60 ans en Afrique noire, et notamment dans les pays francophones, on constate que c’est exactement la même chose qu’au temps colonial où les peuples étaient abandonnés à leur sort et n’avaient que le droit d’être corvéables à merci : travaux forcés, impôts forcés, tirailleurs forcés, guerres mondiales forcées. Pendant que le fruit de leur travail, à l’instar des matières premières, étaient drainés de façon continue vers l’Europe, vers la Grande France. Dans ces conditions, on comprend le tollé que suscite l’intervention d’un coup d’État lorsque et seulement lorsqu’il vise – comme c’est le cas des officiers patriotes du Sahel – à mettre un coup d’arrêt à ce train de domination, de pillage, de famine, de génocide et de racisme sur fond de  zombification, de francophonie, d’aliénation, d’inconscience et de misère.…

Non, ce qui se passe au Sahel et ailleurs en Afrique n’a rien à voir avec la Démocratie ni son contraire. La démocratie n’a jamais nourri aucun peuple de la terre. Ce qui se passe en Afrique c’est l’injustice de l’accaparement des richesses par une caste au service des puissances coloniales historiques. Ce qui est prioritaire à une nation, c’est la souveraineté, la justice, la nourriture, l’éducation, la santé et la cohésion. Certes dans la justice et la cohésion réside le chemin de quelque chose qu’on pourrait appeler démocratie mais non seulement elle n’est pas une priorité mais elle ne doit jamais être imposée de l’extérieur selon des normes extérieures aux sociétés africaines, qui n’ont pas attendu les Blancs pour créer des sociétés inclusives où tout le monde à sa place. Tous les pays où il fait bon vivre de nos jours ne sont pas forcément ce que les occidentaux qualifient de Démocratie ; et nombre de ces pays, n’ont rien à envier aux occidentaux sur le plan du bien être, sur les plans moral et économique. Ce que les Occidentaux appellent Démocratie ce n’est que des mœurs bourgeoises entées sur un bien être acquis dans le vol et le viol permanent des pays du Sud, notamment l’Afrique noire. Car dans la réalité, pour ne prendre qu’un exemple, quand on prend la peine d’observer les mœurs politiques et sociales d’un pays comme la France qui se dit démocratique, on est surpris de voir qu’on y coupe des mains ou éborgne des citoyens qui protestent pour une vie meilleure ; on voit que les groupes ou personnes politiques qui ne sont pas dans la doxa sont cyniquement exclus du jeu politique par des artifices ; on voit que la presse est aux mains d’un ramassis de milliardaires ; on voit que cette presse est utilisée pour amener au pouvoir et soutenir activement le représentant d’une caste européiste et capitaliste ; on voit qu’une figure d’épouvantail inventée depuis plusieurs décennies sert à piéger les électeurs dans une alternative manichéenne trompeuse.

Donc, il faut féliciter les Officiers patriotes du Mali de n’avoir pas obtempéré aux injonctions de la soi-disant  communauté internationale pour y rétablir de toute urgence ce qu’elle appelle démocratie ; féliciter les officiers patriotes du Mali et le peuple malien d’avoir pris le temps qu’il faut pour refonder le vivre ensemble de la nation malienne dans la souveraineté, la justice, la nourriture, l’éducation, la santé et la cohésion. Telle doit être aussi la démarche des Burkinabè et aujourd’hui des Nigériens. La noble mission des officiers patriotes qui seuls étaient capables de rompre le cercle vicieux de la domination néocoloniale, qui seuls ont été sur les champs de bataille et ont vu de leurs yeux, vécu dans leur chair la souffrance des peuples, les crapuleries macabres et racistes de la France, son soutien aux terroristes qu’elle prétend combattre, leur but n’est pas de faire la démocratie sur ordre d’on ne sait quelle communauté internationale. Non leur mission est de jeter les bases du vivre ensemble d’une communauté africaine souveraine et juste.

Adenifuja Bolaji