Niger : Nigeria, Partira, Partira pas ?

Alors que les rodomontades font rage et que des plans d’attaque de la cedeao au Niger sont plus ou moins délibérément fuités, bien  malin qui pourrait savoir la part que prendrait le Nigeria dans cette agression insane contre son voisin du Nord. La participation de l’armée  nigériane donnerait une onction anglophone à une aventure qui porte la marque à peine cachée de la France et de ses dominions francophones.

Il se murmure que le Nigeria, doté de la plus grande armée d’Afrique de l’Ouest, devrait fournir la majeure partie des soldats nécessaires à l’intervention. Dans cette affaire, la position du président nigérian est entachée d’ambiguïté dans la mesure où l’opinion a du mal à faire la part entre son rôle de président du Nigeria et celui de président en exercice de la cédeao. La communication de la cédéao et des dominions francophones jouent sur cette ambiguïté et fait planer le spectre d’une force d’intervention robuste dont les troupes nigérianes constitueraient la colonne vertébrale. Mais rien n’est moins flou ou incertain. En effet, le parlement nigérian s’est auparavant opposé au déploiement de troupes au Niger, même si le président Tinubu n’a pas encore formulé de demande spécifique concernant le déploiement de troupes. Certes, la constitution nigériane autorise cependant le président à déployer des troupes même sans l’approbation parlementaire qu’il pourrait solliciter après le déploiement. Mais cette autorisation se fait dans des conditions spécifiques qui, dans l’état actuel des choses, sont loin de ressembler à celles qui caractérisent une éventuelle intervention au Niger.

Selon article 5(5) de la constitution nigériane, « le Président, en consultation avec le Conseil de défense nationale, peut déployer des membres des forces armées de la Fédération pour une mission de combat limitée en dehors du Nigeria s’il est convaincu que la sécurité nationale est menacée ou en danger imminent »

La constitution ajoute que le président devra, dans les sept jours suivant l’engagement effectif au combat, demander le consentement du Sénat et que le Sénat devra ensuite donner ou refuser ledit consentement dans un délai de 14 jours.

Or, en toute honnêteté, à moins de vouloir instrumentaliser les textes, ou passer en force, il est difficile de convaincre les parlementaires et surtout l’opinion nigériane que les vicissitudes politiques du Niger sont de nature à constituer une menace ou un danger imminent pour le Nigeria.

Ainsi il apparaît clairement que le flou entretenu sur la composition de la force d’intervention de la cédéao, et notamment sur la contribution hypothétique du Nigeria, a surtout une fonction d’épouvantail. Dans un contexte où les pressions sur les nouvelles autorités du Niger avant d’être militaires sont d’abord médiatiques et psychologiques, la France et ses dominions ont plus que tout besoin du poids lourd nigérian. Ce géant démographique et économique de l’Afrique, sert de caution anglophone et politique à la France et ses présidents-boys pour maquiller  la réalité de ce qui, somme toute, reste un sombre projet de viol incestueux.

Adenifuja Bolaji