
Ce que la France a imposé à ses dominions d’Afrique qui s’exécutent avec zèle, elle est obligée de supplier le Nigeria pour l’obtenir. Se cachant sous le manteau de l’Union Européenne (UE), la France a prié le gouvernement nigérian de reconsidérer sa position sur les restrictions de vols imposées aux compagnies aériennes Air France et KLM dans la foulée, l’allemand Lufthansa s’associe à la même demande.
La demande a été faite le 18 septembre dernier à Abuja lors d’une réunion entre le groupe de travail présidentiel sur le Covid-19 et les ambassadeurs de l’Union Européenne conduite par Ketil Karlsene, le chef de la délégation de l’UE au Nigeria et à la CEDEAO.
Pour la demande formulée par l’UE, Karlsen a déclaré que « la disponibilité des vols de l’Europe vers le Nigeria et vice versa est très importante… nous avons appelé nos partenaires du côté nigérian à reconsidérer la possibilité d’avoir à nouveau quelques-uns des plus gros transporteurs en provenance d’Europe vers le Nigeria ».
Pour sa part, le ministre nigérian des Affaires étrangères, Geoffrey Onyeama, qui a conduit la délégation nigériane à la réunion a fait observer que la position du Nigeria n’est pas figée et peut être révisée. Il a souligné que le Nigeria a pris note de la doléance de l’UE et que « nous examinerions l’évaluation que nous donnerons aux compagnies européennes et d’autres qui entreront dans l’espace aérien du Nigéria ».
Depuis le début de la pandémie, avec les mesures restrictives prises de par le monde et conformément à la clause de réciprocité clairement énoncée par le Nigeria, seules les compagnies British Airways, Ethiopian, AWA et Middle East Airlines, étaient autorisées à entrer dans l’espace aérien du Nigéria.
Tout de même curieux de voir que la France quémande auprès du géant nigérian ce qu’elle oblige les pays francophones africains à faire et que ceux-ci exécutent en imposant des contraintes à leurs peuples au bénéfice de la compagnie aérienne française. Par exemple, la contrainte pour le voyageur Béninois de payer 100.000 CFA de test, alors que c’est à la compagnie aérienne d’assurer que les voyageurs qu’elle transporte sont sains.
La morale de cette histoire est multiple. D’abord, on peut dire qu’il ne fait pas bon être une colonie française. La dureté de cette condition ne date pas d’hier. Comparée à l’anglaise, la colonisation directe française était dure du temps de la présence des gouverneurs blancs ; elle le reste du temps des gouverneurs noirs. Le mépris du peuple est le même et l’exploitation des ressources matérielles et humaines plus que jamais renforcée, avec les guerres civiles et génocides en plus. La différence avec les colonies anglaises se trouve aussi au niveau de la monnaie, et l’arnaque du CFA à laquelle la France se livre depuis plus de 60 ans, sans vergogne ni scrupule, pillant les réserves des pays africains pour financer son train de vie. Enfin, l’attitude du Nigeria montre bien que l’union fait la force. Après avoir tenté de contribuer activement au démantèlement de la fédération nigériane dans les années 70 en soufflant sur les braises de la guerre du Biafra, la France est obligée de compter avec ce géant dont le PIB est égal à 75% de toute la CEDEAO, et qui plus est le pays le plus peuplé du continent. Si au lieu d’être un seul pays, il y avait à la place du Nigeria une diversité hétérogène de 10 ou 15 états distincts soit disant indépendants, la France aurait fait une bouchée de chacun d’eux, et ne serait pas en train de quémander aujourd’hui l’ouverture de l’espace aérien du géant ouest-africain. Donc que cela nous fasse méditer : l’union et la fraternité sont notre force.
Adenifuja Bolaji
