
Les créations africaines ont quelque chose à la fois de précurseur, d’écologique et d’intégré.
Le tambour à tension variable (TTV) qu’on appelle chez les Yoruba gangan, et que les Anglais appellent « talking drum » est un exemple pour le coup parlant.
La fonction linguistique relevée par le terme anglais est exact mais elle est loin d’épuiser la variété fonctionnelle de l’objet.
Quand le tambourinaire entonne une chanson au moyen du gangan, ou quand un revenant egougoun fait répéter une déclamation poétique, un proverbe ou une sentence par le gangan, la foule située dans un rayon de plusieurs centaines de mètre peut entendre le message ou la chanson ainsi diffusée.
Donc la fonction linguistique du gangan considéré comme talking drum n’épuise la richesse technique et sociale de sa fonctionnalité en tant qu’instrument de communication : il y a aussi et surtout la fonction de haut parleur. Le gangan est avant tout un haut-parleur avant l’heure avant d’être un parleur ; sa véritable fonction est de haut-parler. Il fait aussi bien parler les morts que les vivants, sachant que la voix des morts est en principe inaudible. Il s’agit donc là d’une prouesse d’une haute portée symbolique.
Souvent d’ailleurs, il y a un décalage mélodique entre le son du gangan et la réponse du public. En somme le son du gangan, sa parole a aussi une fonction d’indicateur mnémonique, de signal spécifiant au sein d’un répertoire référentiel socialement codifié.
Bidemi Aderibigbe
