La Princesse Ressuscitée

En ce temps là, on ne pratiquait pas encore le culte des morts.

« La fille d’un grand roi s’était mariée avec un des plus fidèles officiers de son père. Cet officier avait une première femme, issue du peuple comme lui-même.

Un jour, les deux coépouses se rendirent à la rivière pour chercher de l’eau. La princesse y allait pour la première fois.

Sans le paraître, la rivière était trop profonde et il ne fallait pas trop s’y avancer pour prendre de l’eau.

Quand les deux femmes furent au bord du marigot, la plus ancienne dit à sa compagne : « Princesse, va bien loin t’approvisionner. C’est ton eau que nous boirons ;  il faut donc la prendre à l’endroit où l’onde est bien limpide. L’eau de mon canari servira à notre toilette. »

Confiante et inexpérimentée,  la jeune princesse alla jusqu’au milieu du marigot. Et là, elle fut prise dans un tourbillon et disparut, sa compagne n’ayant rien fait pour la sauver. Bien au contraire, elle se réjouit longuement de cette terrible mésaventure..

Revenue à la case, elle se garda bien d’en parler à personne ; d’ailleurs, leur mari était à la cour et ne rentrerait que la nuit.  Quand il fut de retour, il demanda sa nouvelle femme. La première lui répondit : « Elle t’a suivi ce matin, je croyais que c’était pour t’accompagner. »

Après une recherche vaine de toute la nuit,  l’homme alla de bonne heure, ainsi qu’à l’ordinaire, au service du roi.

Jusqu’à son retour du lendemain soir,  la nouvelle femme n’avait pas reparu. Inquiet et abattu, le mari résolut de consulter un Bokonon.

Le devin, suivant la prescription du Fa,  lui pardonna d’acheter une natte «  kpla-kpla » colorée en blanc, rouge et noir.

Le devin fit étendre la natte au bord du marigot du village. Il prononça quelques paroles et fit battre du tam-tam.

Au bout d’un certain temps, la jeune princesse apparut sur la natte, plus ravissante que jamais.

Une foule nombreuse et délirante l’escorta, tam-tam en tête, jusqu’au village. Ce n’était malheureusement plus qu’une apparence de sa dépouille mortelle. La princesse étant désincarnée ; elle ne put plus retourner dans la maison de son époux.

Dans une mélodie plus douce que le plus pur chant des oiseaux,  elle conta comment elle avait été perdue. Elle demanda qu’on lui construisît une case devant l’agglomération de son [royal] père. Elle s’y glissa et résida là, invisible depuis cet événement.

Le mari pour punir la femme perfide, la chassa de sa maison. »

Et depuis lors fut institué le culte des morts, en souvenir à cette princesse innocente mortellement piégée par la jalousie de sa coépouse.

D’après « L’origine du culte des morts » de Anatole Coyssi in Quelques contes dahoméens

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